La mise à l'arrêt du haut-fourneau Arcelor Mittal en 2016 a porté un coup à Seraing, commune située dans la banlieue de Liège. La plupart des adolescents inscrits au collège Saint-Martin, voisin de l'usine, viennent de familles confrontées au chômage et à la précarité. "Ils traversent des choses que nous n’oserions imaginer", explique Jérôme Chantraine, le directeur, tout en nervosité et bienveillance. Délaissé par ses parents, Jérémy a du mal à se concentrer. Vanessa, elle, a perdu son père, emporté par une overdose. Après deux ans de décrochage, elle a magnifiquement redressé la barre, et rêve de devenir avocate. Peu assidue en classe, Zeliha exorcise dans la boxe une rage issue d'une blessure secrète. 

Rempart fragile 
Auteur de plusieurs documentaires diffusés par ARTE (L'homme qui répare les femmes, Enfants du hasard), Thierry Michel a suivi la vie mouvementée du collège Saint-Martin. Hommage à la pédagogie "sport de combat contre la fatalité et l'injustice", son film capte avec justesse les hauts et les bas de l'établissement – du ras-le-bol du directeur face à l'absentéisme des professeurs aux réussites et embrassades de fin d'année, en passant par l'émoi causé par la mort d'un ancien élève, tué alors qu'il cambriolait une station-service. Contrepoint éclairant à ces moments pris sur le vif, des séquences montrent les adolescents se confiant face caméra, avec une étonnante maturité, sur l'école, leur famille ou leur avenir. Si le documentaire montre les efforts des élèves comme des enseignants pour enrayer le déterminisme social, il ne dissimule pas les difficultés quotidiennes, la démotivation des uns, la lassitude des autres, le faible niveau de l'établissement, qui apparaît comme un rempart fragile mais tenace contre l'exclusion. Un plaidoyer vibrant pour la "dernière chance" offerte par l'école.